 |
Au premier abord, ce roman est déroutant. L’auteur nous prévient d’ailleurs dès la première page : "j'espère qu'au début de ce roman, le style et les mots de cette élève de primaire ne vous rebuteront pas". Nous allons en effet plonger dans la vie d’une enfant de dix ans (et de son petit camarade), par le prisme d'un style littéraire très particulier : le journal intime. Et il n'est pas si aisé que cela d'accepter de lire des lignes qui pourront nous paraître décalées. Mais c'est un passage nécessaire, vital même, pour comprendre la suite du récit.
Alors oui, nous faisons avec Blandine Bertaux un retour en enfance qui va nous secouer.
|
Nous allons tenter de nous mettre dans les pas d'Élyse, de voir le monde à travers ses yeux. Nous allons apprendre à la connaître, à découvrir ses bonheurs et ses malheurs, ce qui fait son quotidien, et le manque d'amour maternel qui fait que sa vie est si triste.
À chaque époque de sa vie, l'héroïne va devoir affronter une épreuve nouvelle. La plus lourde, et je ne trahis pas de secret (c’est annoncé en quatrième de couverture) est sans nul doute, le viol d'Élyse. Je crois que c’est ce qui m’a le plus impressionné. Du viol en tant que tel, nous ne saurons rien ou si peu : pas de description précise des sévices, pas de détails sur la durée, sur les actes. Non ! Juste un black-out à la fois salvateur et terrifiant, mais qui nous laisse avec une question : que s'est-il passé ?
Pas de longue enquête policière non plus. Blandine Bertaux fait le choix le plus juste : voir le drame, comme depuis le début, à travers les yeux d'Élyse. Elle choisit les conséquences à l'acte, le jour d'après au jour du viol, la vie de la victime à celle du coupable. C'est pour moi, le point fort de ce roman. Il y a un parti pris complexe au début, mais qui porte un sens, une force incroyable au fil des pages.
Enfin, l'auteur nous impose un rythme de fou. On peut penser le début un peu lent. Profitons-en. Car soudain tout s'accélère. Nous entrons dans un récit intense, dense. Avec des rebondissements qui ne nous laissent pas le temps de respirer… et c’est bien. On a envie de passer les pages plus vite, de ne pas s’arrêter. On a envie de savoir ce qui va arriver à Élyse au fil des années. Et là, on peut le dire, l'auteur n'épargne pas ses personnages. Elle leur fait vivre des situations de plus en plus rocambolesques. Elle nous amène dans les méandre de l'esprit d'une jeune femme qui oscille entre le courage et les doutes, entre l'envie de vivre et l'effleurement de l'abandon.
On sort de ce roman secoué par la douleur et la force des personnages. On sort de ce roman en ayant vécu des épreuves terribles, et compris comment les personnages arrivent à les surmonter. On sort de ce roman changé, parce que notre regard sur le monde ne peut rester indifférent aux souffrances ultimes comme aux souffrances du quotidien. Qu'est-ce que ça fait du bien !
|