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Par ELLIE et Patrick LAGNEAU

HECTOR ET LA CABANE DANS LES ARBRES

2025 04 hector1

L’été est la saison des grandes vacances. Quand on ne part pas à la montagne ou au 
bord de la mer, heureusement, il reste la campagne. Et parfois, la campagne offre des possibilités incroyables dont on se souvient longtemps. 
Cet été-là, Phil est en vacances chez Hector, comme bien souvent d’ailleurs, et ils 
se demandent ce qu’ils vont pouvoir inventer comme jeu.


— J’ai trouvé un endroit dans la forêt où personne ne va. C’est plus loin que le tunnel où passe le train. 
— Oui, et alors ?
— Alors ? Ben alors, c’est un coin tellement perdu qu’on pourrait y construire une cabane. On serait tranquille. Personne ne viendrait nous déranger… Ça te dit d’aller y faire un tour ?
— Allez, c’est parti ! dit Phil en prenant le chemin de la forêt.
— Hé ! Attends ! On ne va pas y aller à 
pied. C’est trop loin. Il faut y aller à vélo. 
— Eh ben, ton père a bien fait d’amener le mien quand il est venu me chercher. Mais 
on n’a pas le droit d’aller sur la route à vélo… 
— T’inquiète ! On prendra des chemins forestiers…
— Et si on rencontre quelqu’un ?
— Mais non, je t’ai dit qu’il n’y avait personne, tu verras. C’est le coin idéal pour construire une cabane…


Une petite demi-heure plus tard, après avoir pédalé sur des traverses forestières et des chemins sous les feuillages, ils parviennent à l’endroit qu’a repéré Hector.

— Voilà, c’est ici ! Qu’est-ce que tu en penses ?

Phil descend de son vélo qu’il pose contre un arbre et regarde ce coin de paradis découvert par son cousin : une sapinière perdue au milieu d’autres arbres feuillus. C’est d’ailleurs ce qui en fait sa particularité.

— Alors ?  
— Ouais, j’aime bien. Mais si on construit une cabane au milieu des sapins, n’importe qui pourra la voir au milieu des troncs tout droits. Regarde, ils ne sont pas assez gros 
pour la cacher quand elle sera terminée. 
— Hé, hé ! ricane Hector, j’ai bien étudié la question. Regarde ! Les troncs sont à peu près tous de la même grosseur. Ils font tous à peu près dix, douze centimètres de diamètre.
— Oui, et alors ?
— Alors ? Alors on va les couper pour construire une vraie cabane comme celle des 
trappeurs ! Avec des murs en rondins et en hauteur pour que les bestioles ne viennent pas à l’intérieur quand on ne sera pas là. 
— En hauteur ? Et comment tu veux faire ça ?
— Fastoche ! Déjà on se construit une échelle pour pouvoir grimper jusqu’à l’endroit où on commencera par installer un plancher en rondins aussi. 
— Pourquoi un plancher ? 
— Réfléchis deux secondes ! Quand on aura installé le plancher à au moins trois mètres de haut, on pourra marcher dessus et construire les murs autour.
— Ouais, c’est une bonne idée ! Mais comment tu vas le faire tenir en hauteur ton 
plancher ? 
— Entre quatre troncs. Il suffira de clouer quatre rondins en carré, et ensuite de clouer les autres dessus pour faire un plancher… 
— Ouais, bonne idée ! Et après, on n’aura 
plus qu’à monter les murs… 
— C’est ce que je t’ai dit, oui. 
— Mais il y a un problème ? 
— Lequel ? 
— Avec quoi on va couper les arbres ? On n’a pas de tronçonneuse… 
— Hé, hé, j’y ai pensé figure-toi ! Mon père a une scie dans son atelier. Il a aussi plein de clous. Juste ce qu’il nous faut pour construire notre cabane. 
— Et tu vas lui demander ? 
— T’es fou. Il ne voudra jamais. Non, je vais lui piquer sans le lui dire. De toute façon, il en a tellement qu’il ne se rendra compte de rien. 
— Tu es sûr ? 
— Fais-moi confiance ! Je connais son atelier par cœur. Tu verras…

De retour à la maison, comme Papa est parti au travail, il est facile d’aller à son atelier.

— Mince, dit Hector, je ne vois pas la scie… Tant pis, on va prendre la petite, là, il appelle ça une scie à métaux… 
— Tu crois que ça ira pour couper les sapins ? demande Phil. 
— Ce sera plus long, mais je vais prendre des lames de rechange, regarde, il en a plein 
dans le tiroir de l’établi ! Et là, regarde… il y a plein de clous… 
— Il ne dira rien, ton père ? 
— Tu parles ! Je t’ai dit qu’il en a tellement qu’il ne s’en rendra même pas compte… On va en prendre une cinquantaine… Tiens, passe-moi le sac à côté de toi ! On va les mettre dedans… 
— Punaise, ils sont longs… 
— Hé ! Il faut qu’ils le soient pour traverser les rondins…


Peu après, les deux garçons enfourchent leurs vélos après avoir glissé scie à métaux, lames, clous, marteau et serpette dans les sacoches accrochées aux porte-bagages. 

— Pourquoi tu as pris une serpette ? demande Phil.
— Pour couper les branches des quatre troncs sur lesquels s’appuiera le plancher de 
la cabane. 

Et debout sur les pédales, les voilà partis en direction de leur coin de paradis secret.
Après une demi-heure sur les mêmes traverses forestières et chemins sous les feuillages que la première fois, ils parviennent à la sapinière. 
En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, les quatre sapins de base sont repérés, 
élagués sur une hauteur de trois mètres. D’autres sapins aux troncs plus fins sont coupés à la scie à métaux, et Hector se félicite d’avoir pris des lames de rechange tant ils en cassent en les débitant en rondins. 
La première tâche de construction pure est le façonnage d’une échelle suffisamment 
longue pour atteindre l’endroit où sera cloué le plancher.  
Trois heures plus tard, le plancher est en place. Les premiers pas sont timides, juste le temps de s’assurer de la solidité de l’ensemble. Vérification faite, ils prennent beaucoup de plaisir à marcher sur leur création, à trois mètres de hauteur.  
Satisfaits de leur première journée de travail, ils rentrent à la maison en se promettant de revenir le lendemain pour commencer à monter les murs.
Après un repas copieux le soir et une bonne nuit de sommeil, les voilà de nouveau à pied d’œuvre. De nouveaux sapins sont abattus, débités en rondins acheminés sur le plancher par l’échelle. Une fois le stock suffisant, un premier mur est monté avec 
empilement de rondins sur une hauteur d’un mètre cinquante.  
Sur le coup de midi, c’est la pause. Ils avalent leurs sandwichs préparés par la 
maman d’Hector, se désaltèrent aux gourdes 
qu’ils avaient emportées, et reprennent 
aussitôt leur construction. Ils attaquent un second mur, perpendiculaire au premier, mais cette fois avec une fenêtre carrée au milieu. 
En fin d’après-midi, ils se sentent fatigués et d’un commun accord, décident de rentrer. Un dernier regard plein de fierté sur leur cabane dans les arbres, et les voilà repartis sur le chemin du retour. 
À table, Papa leur demande ce qu’ils ont fait de leur journée. Hector n’a pas le temps d’inventer une réponse, car Phil, enthousiaste, est plus rapide que lui.

— Oh, tu verrais, Tonton, on a fait une cabane dans les bois, elle est terrible…
— Ah bon ? C’est vrai Hector ?
— Oui, oh, tu sais, c’est une petite cabane qui…
— Une petite ? le coupe Phil, mais non, elle est super, on dirait une cabane de trappeur. Si tu veux, on pourra te la montrer…
— Ah, eh bien, d’accord répond Papa, demain c’est dimanche, on ira voir ça… D’accord Hector ?
— Mouais, si tu veux…
— Tu n’as pas l’air content… 
— Si, si. C’est juste que… ce n’est pas tout 
près…
— Oh, ça va, poursuit Phil, on n’a mis qu’une demi-heure à vélo pour y aller…
— Eh bien, je prendrai aussi le mien… Ça fera une petite balade…

Hector ne sait pas pourquoi, mais il ne sent pas bien cette sortie avec Papa. Une fois 
qu’il se retrouve dans la chambre avec Phil, il lui saute dessus.

— Alors toi, tu es vraiment nul. Pourquoi tu as dit à Papa qu’on allait lui montrer la 
cabane ? 
— Ben quoi ! Elle est chouette, non ! Je suis sûr qu’il ne va pas en croire ses yeux…
— Ça, c’est sûr ! Et tu lui répondras quoi quand il te demandera avec quoi on a scié les arbres et cloué les rondins ? Avec des ciseaux et des agrafes ?
— Mince, je n’y ai pas pensé… 
— Oui, ben maintenant, c’est trop tard !

Le lendemain, Papa, Hector et Phil pédalent sur les mêmes traverses forestières et les mêmes chemins sous les feuillages jusqu’à la sapinière. 

— Voilà, c’est ici !

Les vélos à peine posés dans l’herbe, Papa regarde autour de lui, mais ne voit rien.

— Eh bien, elle est où votre cabane ?

Papa aperçoit à cet instant les deux garçons qui regardent timidement vers la cime des arbres. À son tour, il lève la tête et découvre, estomaqué, la construction en rondins à trois mètres de hauteur.

— Nom d’une pipe ! C’est vous qui avez fait ça ?
— Oui, c’est nous ! répond Phil crânement.
— Allez, hop ! Prenez vos vélos ! On s’en va…
— On va où ? demande Hector. 
— À la maison ! Mais avant, je veux vous montrer quelque chose… Venez avec moi !

Papa a pris le chemin qui contourne la sapinière, les deux garçons derrière lui. Parvenu à la lisière face à l’étendue campagnarde, il s’arrête devant une pancarte.

— Que lisez-vous ? leur demande-t-il.

Hector déchiffre les trois grosses lettres qui se détachent en blanc sur fond vert.

— O… N… F… ? 
— Oui, et tu sais ce que cela signifie ?
— Euh… non. 
— Office National des Forêts. Et tu vois ce qui est écrit en dessous ? 
— Euh… c’est écrit un peu petit… 
— Je vais te le dire, moi : « Propriété privée, défense d’entrer », voilà ce qui est écrit ! Maintenant, on ne traîne pas ici. Hop ! Direction la maison. À partir de maintenant, vous oubliez que vous êtes venus ici et ce que vous y avez fait. Et surtout, vous n’en parlez à personne. C’est compris ? 
— Oui, répondent en chœur les deux garçons, sidérés.

Sûr, ils comprennent que Papa n’a pas envie de payer les pots cassés, ou plutôt… les 
sapins sciés !

Une semaine plus tard, alors qu’Hector et Phil font du vélo dans la campagne, au loin, ils repèrent la sapinière. 
— On y va ? demande Hector à son cousin.
— Ton père ne va pas être content s’il le sait… 
— On ne lui dira pas. 
— Et pourquoi tu veux aller là-bas ? 
— Juste pour revoir une dernière fois la cabane. Tu sais, on a presque construit un 
chalet canadien…  
— Oui, je sais, mais ton père… 
— Si tu la fermes, il n’en saura rien. Allez… viens ! Juste une dernière fois… 
— Bon, mais on ne reste pas longtemps, hein ! 
— Promis.

Lorsqu’ils parviennent à la sapinière, en passant devant la pancarte blanche avec les 
trois lettres blanches O.N.F. sur fond vert, ils savent qu’ils prennent des risques.

— Tu crois qu’on y va ? demande Phil. 
— Maintenant qu’on est là, on ne va pas repartir sans la regarder encore une fois…

Quand ils parviennent au pied des quatre troncs qui ont servi de base à leur construction, une surprise désagréable les attend : un amas de rondins gît entre les quatre arbres.  
Comme pour conjurer cette vision à laquelle ils refusent de croire, ils lèvent la tête vers leur cabane… Les quatre troncs montent vers les cimes, mais point de plancher en rondins, point de murs, rien. Le vide. Leur chalet canadien a été démonté.

— Allez, on se tire, dit Hector en enfourchant son vélo. 
— On va où ? 
— Tu ne comprends pas ? C’est sans doute le propriétaire de la sapinière qui l’a démonté.  
— Ça ne lui plaisait pas ? 
— Ce qui ne lui plaisait pas, c’est que ses sapins ont été sciés. Allez, on se tire, magne-toi ! S’il revient dans le coin, pas la peine qu’il nous voie ici…

Dans la campagne, les moutons dans les parcs n’ont jamais vu deux gamins faire du 
vélo aussi vite.
Deux gamins qui ont construit… une cabane dans les arbres.

2025 04 hector2 

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