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Par Édith PROT

Pierre Louis Napoléon Cavagnari

Eh bien, me direz-vous, avec de tels prénoms, voilà un personnage bien de chez nous !… Pas du tout ! Ce Meusien n’a de français que ses prénoms. Mais bon, on ne va pas chipoter…
Pierre Louis Napoléon nait à Stenay en 1841. Son père est un comte italien de la région de Parme et sa mère une anglo-irlandaise. Alors pourquoi Stenay ?
Parce que le comte Cavagnari est entré au service de la famille Bonaparte et est venu s’installer en France. Mais la situation instable du pays qui ne cesse de basculer d’un régime à l’autre les incite à quitter le pays en 1843 pour rejoindre Londres. Le jeune Pierre Louis, que l’on appelle Louis, étudie pendant six ans à l’école Christ’s Hospital de Londres en attendant sa naturalisation. Il l’obtient en 1857 et peut ainsi entrer à l’académie militaire d’Addiscombe. À sa sortie, il intègre comme enseigne le 67ème régiment d’infanterie indigène dans la Compagnie des Indes.

Il est envoyé en Inde où il rejoint les fusilliers européens du Bengale qui tentent de mater une rébellion dans la région d’Oudh. Il s’y distingue en participant à la capture de cinq canons, ce qui lui vaudra le grade de lieutenant en 1860.

Sa carrière prend alors un essor fulgurant. Il devient commissaire adjoint de la région du Pendjab en 1861 et y épouse Mercy Emma Graves en 1871. Puis il devient commissaire adjoint du Peshawar (l’actuel Pakistan) en 1877.

Pendant toute cette période, il a de fréquents contacts plus ou moins amicaux avec les tribus pachtounes. C’est pour cette raison que Sir Neuville Chamberlain demande à Pierre Louis de faire partie de son état-major lorsqu’il monte une expédition pour rencontrer l’émir d’Afghanistan, Shere Ali Khan, qu’il soupçonne de sympathie pour la Russie.

La mission part en 1878, mais un fonctionnaire afghan particulièrement zélé refuse de les laisser entrer en Afghanistan et leur interdit le passage du col de Khyber. Ce camouflet provoque la colère des Britanniques qui entrent alors en force avec trente-cinq mille soldats et obligent l’émir à abdiquer en faveur de son fils Yaqub qu’ils estiment plus facile à manipuler.

C’est Pierre Louis Cavagnari qui va mener les négociations avec Mohamed Yaqub Kahn pour obtenir la signature du traité de Gandamak.

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Si les termes paraissent raisonnables aux Européens, les Afghans ne semblent pas partager le même sentiment puisque lors de la signature du traité, ils se présenteront revêtus d’un uniforme de l’armée russe en signe de protestation.

Ce traité prévoit en effet la cession de plusieurs territoires à l’Inde britannique et surtout impose la présence d’un représentant britannique à Kaboul,  plaçant de fait l’Afghanistan sous surveillance, ce que les habitants acceptent fort mal.
En récompense de son travail, Pierre Louis reçoit une décoration prestigieuse, l’ « Étoile de l’Inde » et est fait chevalier de l’Ordre du Bain. Lors de son intronisation dans cet ordre de chevalerie, le vice-roi des Indes l’exhortera à choisir de se faire appeler « Sir Louis » de préférence à « Sir Napoléon » , le monde n’étant pas assez vaste pour deux Napoléon.

On lui confie ensuite le poste si controversé de Kaboul où il se rend à la fin du mois de juillet 1879 avec plusieurs fonctionnaires Britanniques et une garde composée de soldats indiens, les « Corps Guides ». Par précaution, son épouse ne fait pas partie du voyage, car Pierre Louis sait que la situation est très instable. L’accueil qui lui est fait par Yaqub Kahn à son arrivée semble cependant amical et il prend ses quartiers dans le Bala Hissar, une citadelle de la ville.

À peine plus d’un mois plus tard, une mutinerie éclate au sein de l’armée afghane (on soupçonne l’émir d’avoir tenu un rôle assez ambigu dans cette affaire). Les mutins réclament le paiement de leur solde et surtout le départ des étrangers. Accompagnés d’une partie de la population, ils se rendent à la citadelle où se trouvent les Britanniques pour les en déloger.

Louis Cavagnari et ses hommes offrent une résistance désespérée, tout comme les guides indiens qui refusent de se rendre malgré la promesse qui leur a été faite de leur laisser la vie sauve. Tous seront massacrés.

Louis Cavagnari est décapité et sa tête promenée dans la ville par le maire de Kaboul pendant que son corps ainsi que ceux de ses compagnons brûlent dans l’incendie de la citadelle. Louis Napoléon n’avait pas encore trente-huit ans.

La nouvelle de ce massacre souleva une vague d’indignation et une expédition punitive fut dépêchée à Kaboul. Les meneurs ainsi que le maire furent pendus. Outre l’hommage rendu à Cavagnari, la reine Victoria demanda à ce que l’héroïsme des Guides indiens soit célébré par une inscription sur leur drapeau, ainsi que par un monument élevé au Pakistan dans la ville de Mardan d’où étaient originaires la plupart de ces soldats. Ce monument est encore visible de nos jours, quoique très abîmé, et porte le nom de « Mémorial des Corps Guide de la Reine » ou « Arche de Cavagnari »

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Mémorial du Queen's Own Corps of Guides,
Arche de Cavagnari à Mardan

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