Le coin historien6 102-fevrier-1.jpg2022

Par Jean-Luc QUÉMARD

Quemard jean luc 5

Stenay au fil du temps
Première partie : de la naissance à la révolution de 1789

 

Il ne s’agit pas ici de décrire l’historique complet, mais d’en rappeler les principales étapes.

C’est à l’époque gallo-romaine au 1er siècle qu’est construite la villa Sétinius[1] qui devient Sathenay, Sathanay, puis Stenâ en patois local et en 1643, la cité se nomme définitivement Stenay[2]. Jadis nommée Satanacum à l’époque celtique, elle est voisine des tribus gauloises, dont celle des Rèmes, alliée aux Romains. La guerre menée contre l’empire gallo-romain par les peuples venus de l’Est engendre des désordres. Cette cité subit dès lors, les invasions des Francs et des Alamans qui la détruisent en 275.

Clovis (466-511), roi des Francs en devient le propriétaire pour la céder en 511 à son fils aîné Thierry 1er (485-534). En 676, Dagobert II de retour d’exil la consacre résidence royale. Suite au traité de Verdun en 843, elle fait partie du royaume de Lothaire 1er et en 870 de celui de Louis le chauve (frère de Lothaire 1er et de Louis le Germanique).

En 882, le comte Régnier (850-916) du Hainaut et du Maasgau[3]  défend Stenay et les environs des envahisseurs scandinaves remontant la Meuse. En 886, le roi de la Francie occidentale et empereur d'Occident, Charles III « dit le Gros », cède Stenay au comte Régnier Ier.

En 1076, Stenay est placée sous la tutelle de Godefroy de Bouillonchevalier Franc puis duc de Basse-Lotharingie qui la délivre en 1088 du siège mené par le comte-évêque de Verdun au cours d'une sanglante bataille au lieu-dit « Champ des Morts » qui se situe entre Bronelle et Nepvant. En 1096, pour financer son expédition lors de la première croisade, il vend Stenay et son château au prince-évêque (Richer ou Richard 1089-1107) de Verdun.

En 1109, l’évêque de Verdun, Richard II de Grandpré (1107-1117), place Stenay sous la protection du comte Guillaume Ier de Luxembourg.

En 1114, le comte de Champagne, Érard Ier de Brienne (1070-1125) occupant Mouzon et Yvois (devenu Carignan), soutenu par le roi de France, souhaite s’attribuer Stenay. Des guerres qui dévastent la région s'ensuivent. La cité est tiraillée entre le Luxembourg et la Champagne.

Vers 1124, Stenay retourne durablement à la Maison des comtes de Bar sous la suzeraineté des empereurs germaniques. De 1240 à 1291, sous le règne du comte Thiébaut II de Bar (1221-1291) la ville connaît une période de répit qui se prolonge jusque sous le règne de René Ier d’Anjou dit « le bon roi René », (1409-1480) qui devient duc de Bar puis duc consort de Lorraine en 1431.

En 1442, malgré ses fortifications, Stenay est prise par des bandes de « scélérats, appelés écorcheurs ». L’église Saint-Grégoire est incendiée et nécessite d’être reconstruite.

En 1542, un magasin aux vivres[4] est édifié par le roi de France, François Ier (1494-1547) qui, en 1541 contraint le duc Antoine de Lorraine « dit Le Bon » (1489-1544), à lui céder Stenay et sa prévôté. L’ensemble est notifié en 1544 par le traité de Crépy-en-Laonnois.

En 1552, la ville est occupée par les princes de Habsbourg. Cette situation suscite la reprise des hostilités entre la France et les « princes impériaux ». Le roi de France, Henri II (1519-1559) lors de sa chevauchée d’Austrasie conquiert les trois évêchés de Verdun, Toul et Metz.

En 1591, Henri de la Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne, envahit Stenay par surprise. Les protestants alors maîtres de la ville, commettent de nombreuses exactions, notamment la profanation des églises et la destruction d’une partie des reliques de Saint-Dagobert. La paix étant signée au Traité de Folembray (Aisne) en janvier 1596, la ville est finalement restituée aux Lorrains.

En 1641, Charles IV de Lorraine-Vaudémont cède définitivement Stenay à la France par le traité de Saint-Germain-en-Laye.

En 1648, Louis II de Bourbon-Condé, dit « le grand Condé » (1621-1686), reçoit en propriété durant le mois de décembre les villes de Stenay, Dun, Jametz, Clermont, soit, la région du Clermontois.

En 1650, Condé prend la tête de la « Fronde des Princes ». Après son arrestation et son incarcération au château de Vincennes, Stenay devient le foyer d’un mouvement contestataire jusqu’en 1654. Tous les grands acteurs de cette rébellion se rencontrent et fréquentent la cité régulièrement.  S’alliant à Philippe IV d’Espagne[5] (1605-1665), ils engendrent l’occupation de la cité par un détachement espagnol.

En 1654, le jeune roi Louis XIV (1638-1715) décide de faire le siège de Stenay pour affirmer son pouvoir et sa mainmise effective sur ses états. Ce dernier débute le 20 juin et se termine le 7 août. Du côté des assiégés : Nicolas Bouton (1598-1662) comte de Chamilly mandaté gouverneur pour Condé et le colonel Colbrand disposent de 1800 hommes. Pour les assiégeants : le marquis Abraham Fabert d'Esternay (1599-1662), gouverneur de Sedan, s’installe au château de Cervisy avec à sa disposition 4 700 hommes. Un jeune ingénieur militaire non encore diplômé commence sa glorieuse carrière à Stenay. Il s’agit de Sébastien Le Prestre de Vauban qui est blessé à deux reprises durant le siège. L’église Saint-Grégoire reçoit en un seul jour près de 150 boulets d’artillerie, la grande halle de la place centrale aux arcades est démantelée pour récupérer les matériaux nécessaires à l’effort de guerre. À l’issue des 32 jours de siège, la capitulation de Stenay est célébrée à Paris pendant deux joursLe roi Louis XIV alors âgé de 16 ans, avec Jules Raymond Mazarin (1602-1661) et 300 gentilshommes y séjournent.  Pendant les 4 semaines de sa villégiature, il profite du beau temps pour se baigner plusieurs fois dans la Meuse au lieu-dit « le gué des canons ». Le souverain est hébergé à l’hôtel du Gouverneur, Mazarin est logé dans la maison du lieutenant du Roi.     

En 1659, la signature du Traité des Pyrénées met fin à la guerre contre l’Espagne. Stenay revient donc sous la tutelle de Condé. En 1689, le démantèlement de la citadelle et des fortifications débute sous le contrôle de Vauban.

En 1709, l’hiver très rigoureux provoque une famine généralisée sur tout le royaume de France y compris à Stenay. La cité fait face et connaît ensuite un redressement démographique ainsi qu’un essor économique florissant sous la gestion des princes de Condé. En 1729, les religieuses de la congrégation Saint-Charles de Nancy s’installent dans l’hôpital Saint-Antoine et ouvrent une école primaire pour les filles.

En 1766, le prince Louis Joseph de Bourbon-Condé (1736-1818) crée un atelier d’imprimerie qui se maintient jusqu’à la fin du XXe siècle.
En 1774, il signe un contrat avec Alphonse Boudet, maître de forges à Beauclair, pour l’installation d’une fonderie sur la rive droite de la Meuse, sous l’ancienne citadelle. C’est le début d’une longue tradition industrielle qui se maintient 230 ans.
En 1787-1788, une nouvelle disette s’installe suite à une grande sécheresse et à un hiver rappelant celui de 1709, qui entrainent de médiocres récoltes.
Le 1er août 1789, Stenay constitue sa milice bourgeoise ou « garde citoyenne » sous la responsabilité du maire, monsieur Fontaine qui en devient le colonel. En septembre, la crise s’installe.

Sources documentaires :

  • Bulletin n°1,4,7,12 de la société d’Histoire et de l’Archéologie de la Meuse - Jean Mourroux
  • Dossiers documentaires meusiens n° 38 – Stenay hier – tome I – Jean Maillard
  • Ouvrage d’André Gilbert - Le siège de Stenay en 1654 – édition de 1893

[1][1] Certains historiens attribuent son nom à Satan et d’autres à Setinius, personnage qui vécut au 1er siècle avant J.C dans la région de Rome.

[2]Le chanoine Vigneron (en fonction de 1941 à 1966), passionné par l’histoire locale et linguiste érudit, a recensé 25 noms.

[3] La Maasgau ou comté de Meuse (Pagus Maasgau) est un comté carolingien, subdivision de la Lotharingie inférieure.

[4] Ce magasin est devenu aujourd’hui le musée de la bière.

[5] Ce souverain est issu de la Maison de Habsbourg qui domine l’Europe.

(Toutes les photos peuvent être agrandies d'un simple clic)

2022 02 historien1 2022 02 historien2

Siège de Stenay - Les forces assiégeantes

Le Grand Condé vers 1654-1658

 

Bas retour page precedenteBas pp archives e

Lectures de cette page
web counter

Commentaires

  • Régine  Licciardi

    1 Régine Licciardi Le mercredi, 02 février 2022

    STENAY.
    Ville du Nord a précisé Monsieur Pierre Lombard .
    Du Nord meusien s'entend.
    Petite ville ignorée qui aura le privilège d' accueillir Plume ce 6 février.
    Jean- Luc Quémard a voulu faire connaître cette localité grâce à un beau travail de recherche historique , un travail de précision.
    Ainsi , Stenay sort de l' ombre grâce à lui .
    Que tous les plumistes y fassent de belles rencontres et y connaissent le succès !

Ajouter un commentaire