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Par Pierre LEFÈVRE

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Les usines à Ligny-en-Barrois
pendant les Trente Glorieuses
(Partie II)

(Toutes les photos peuvent être agrandies d'un simple clic)

FABRIQUE DE MEUBLES

La MAE
Implantée rue des États-Unis, la MAE a succédé aux Établissements Simon-Vivenot, qui avaient été une tuilerie avant de devenir une scierie-tournerie en 1878, appelée la Tournerie. Plus tard, l’entreprise prend le nom de MAE et le porte jusqu’en 1971. À l’origine, quantité d’ouvriers spécialisés œuvraient à la fabrication : ébénistes, tourneurs sur bois et sculpteurs. Plus tard, la mode et les goûts ayant changé, l’entreprise s’est orientée vers des meubles plus modernes, en panneau de particules, plaqués ou laqués. Cela nécessitait moins de technicité. On fabriquait des chambres à coucher et des salles à manger avec livings. À la belle "époque" de l’entreprise, elle comptait presque 300 emplois.

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L’usine est remplacée par Jam’s Meubles qui devient en 1975 LDC (Ligny Dienville Colombey puis Ligny Design Confort) puis SBFM (Société barroise de fabrication de meubles) jusqu’en octobre 1997.

Fouyssac
L’usine était installée rue de Strasbourg, à la sortie de la ville, en face du cimetière.
Elle avait été fondée en 1920 par M. Fouyssac dont le père était contremaître à la MAE. Cette société prend rapidement de l'extension. On y fabrique toutes sortes de meubles de qualité, en chêne massif. L'usine, comme d'autres à Ligny, achetait des lots de bois, faisait sécher les grumes sur place pendant deux à trois années et les sciait.
Comme les entreprises linéennes du même type, Fouyssac a souffert de la concurrence d'usines plus importantes et de l'arrivée de nouveaux modes de vie : dans les années 1960, les jeunes couples n'achètent plus de chambres à coucher en chêne massif ! L’usine ferme ses portes en 1963.

Malard
L’atelier, fondé par Georges Malard en 1929, est situé boulevard de l’Ornain. À l’origine, on y fabrique des règles, des plioirs et des planchettes appelées communément "écrevisses". L'usine fabrique également toutes sortes de petits objets en bois, des articles de bureaux et pour les écoliers, des règles très élaborées, des doubles-décimètres et des plumiers dont le compartiment supérieur pivote. Plus tard en 1952, l’entreprise fabrique du mobilier de cuisine en formica. Elle ferme ses portes en 1968 et se transforme alors en magasin de meubles qui cesse son activité en 2005.

Nicolle et Vautrot
Installée rue du Maréchal de Luxembourg en 1931, la société fabrique des chaises, fauteuils et banquettes convertibles puis elle acquiert les bâtiments de la Falipa (qui appartenait à la famille Aubertel), rue du Grand Cerf. A ce moment, la société ne fabrique plus que des chaises et ferme en 1970.

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Association ouvrière d’ameublement
Cet atelier était situé rue de la Bannière. Il était la propriété d’une coopérative qui avait été créée par des ouvriers qui avaient quitté l’UTL. On y fabriquait des meubles jusqu'au début des années 1950. Ce fut ensuite le garage du carrossier Eros Bizzari.

L'Union des Travailleurs Linéens (UTL)
L’UTL est créée en 1909 par l'abbé Josselin, soutenu par d'autres prêtres, les abbés Brouchot et Kremmer, afin d'aider les ouvriers. C'était la période du catholicisme social. Les Linéens l'appelèrent longtemps "l'usine des curés". Les ouvriers étaient intéressés aux bénéfices de l’entreprise. D'abord installé dans une grange près de l'hospice, l'atelier fut ensuite transféré dans une maison achetée au 111 de la rue de Bar (actuelle rue Leroux).
La société perdit ensuite son caractère mutualiste. René François en prit le contrôle et elle fut dirigée par M. Leblanc. Elle prit de l'extension : les bâtiments s'étendirent sur 75 ares, le nombre des ouvriers varia de 100 à 140 et on installa une machine à vapeur de 200 CV qui produisait le courant électrique.
Jusque 1950, les ouvriers travaillaient 55 heures par semaine et fabriquaient des meubles de qualité en chêne massif : salles à manger, chambres à coucher, commodes, meubles de bureau, cosys etc. L'usine ferma ses portes à la fin de l'année 1964.

LA MÉTALLURGIE

Rouméas
L’usine, dirigée de 1964 environ à la fin de l’année 1978 par les deux frères Roland et Claude Rouméas, est installée à la sortie de la ville en direction de Neufchâteau et emploie 315 personnes. On y fabrique essentiellement des ensembles pour constructions métalliques et l’entreprise assure le montage de ces derniers dans l’hexagone.
Le 21 novembre 1978, l’usine est mise en liquidation judiciaire et occupée par les ouvriers qui barrent quelque temps la RN 4 et la D 966 car 190 licenciements sont annoncés. Une opération "Ligny ville morte" est organisée peu après, le 13 décembre : les commerçants baissent leur rideau pendant le défilé des ouvriers et de nombreux élus, dont le maire Michel Gumy et le conseiller général Michel Leblanc. L’usine ferme ses portes. Elle est remplacée en 1980 par le groupe Kässbohrer qui devient EvoBus en 1996.

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LES INSTRUMENTS DE PRÉCISION

Les débuts de l’industrie
Cette activité a été longtemps considérée comme la grande spécialité de Ligny-en-Barrois. Elle naît probablement grâce à la conjonction de plusieurs facteurs :
La force motrice des moulins sur la rivière Ornain ;
—    la construction des chemins de fer ;
—   la disparition des vignobles à cause de maladies (tel le mildiou, l'oïdium et le phylloxéra) et de la concurrence des vignobles du Midi. Ce déclin du vignoble engendre un chômage important, met sur le marché une main-d’œuvre nombreuse et apte au travail de précision ;
—  les initiatives d’industriels hardis comme Ms. Coyen-Carmouche, Vivenot, Petitjean et Émile Gettliffe ;
—    le banquier Louis Simon puis son fils Théodore qui n’hésitent pas à investir dans plusieurs entreprises.

Deux artisans
Un nouveau métier se développe alors soit dans des usines, soit dans des ateliers d’artisans, soit à domicile : celui des compassiers. Parmi les artisans, citons Paul Possien dont l'atelier, encore visible, était situé dans l'actuelle rue du Maréchal de Luxembourg (près du café Le Terminus) et Émile Bellot, rue de Chartel, qui fabriquait des articles de bureau et de dessin (bâtonnets d'ébène, doubles décimètres, tés et équerres). En plus de ces artisans, Ligny comptait quatre usines de matériel de précision.

L'usine Michaud-Quantin
Elle s'étend à la sortie de la ville, rue de Saint-Dizier (actuelle rue des États-Unis), juste avant les bâtiments de la Tournerie (ou MAE). On y fabrique des compas, des équerres, des règles, des pieds à coulisses et des plateaux à servir en marqueterie. Il reste encore quelques bâtiments de cette entreprise qui ferme ses portes en 1952. Elle faisait travailler 15 à 25 personnes.

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Latour
Les établissements Latour sont fondés à Paris en 1857 par Dominique Latour qui vient s'installer à Ligny-en-Barrois en 1913 au lieu-dit "les Vallotes", près du Chemin du Grand Cerf, à proximité du pont de la Herval qui enjambe le canal. Le siège social est transféré dans la cité des Luxembourg mais la société conserve un dépôt à Paris. Cette SARL Latour et Fils fabriquait des mètres pliants, des niveaux de maçon, des pieds à coulisse, des appareils de réglage pour les chemins de fer, des appareils de géodésie et des appareils de sondage aérologique (avec des lentilles achetées à la Société des Lunetiers).
Les horaires de travail étaient de 7 h à 12 h et de 13 h 30 à 18 h 30. L’effectif fut de 90 ouvriers, au maximum.
L'usine cesse son activité en 1974-1975. Ses bâtiments sont détruits en 1988 pour faire place à un petit lotissement.

La Manucompas
Cette entreprise naît après la Première Guerre mondiale et a cessé son activité en 1935, suite à des difficultés, avant de la reprendre avant la guerre jusqu’à sa fermeture en 1975. Elle a porté plusieurs noms : Entreprise Ducom, du nom du directeur Fernand Ducom, ex-cadre à l'usine Latour, puis Manufacture Française d'Instruments de Mesure, Compasserie du Parc et enfin Charvoz France.

Elle était installée au 128 rue de Neufchâteau (actuelle rue du Général de Gaulle), juste en face du Parc. On y fabriquait des instruments de mesure et surtout des compas, jusqu’à 2 à 300 000 par an. 68 000 étaient encore fabriqués en 1972. L'effectif maximum a atteint 90 personnes.

LA LUNETTERIE

La MGO
La Grande fabrique française de verres de lunettes et d’optique a été créée en 1857 par Émile Gettliffe (d’origine anglaise), avec l’aide de l’industriel Coyen-Carmouche et du banquier Simon. Après 1870, M. Gettliffe développe une usine annexe à Guerpont, qui est dirigée par son fils Charles. Vers 1893, il rapatrie cette unité à Ligny, rebaptise l’ensemble Manufacture Générale d’Optique (MGO). L’usine compte alors plus de 170 ouvriers qui travaillent 9 h 30 par jour. Elle est installée dans le prolongement de la Compasserie, entre l’Ornain et la rue de l’Industrie.
Pendant la 2e guerre mondiale, l’usine est dirigée par Pierre Laviolette, maire de la cité, puis par Max Gettliffe (petit-fils de Charles) jusqu’à sa fermeture en 1969.
On y fabriquait des verres de lunettes, des miroirs prismes, des lentilles pour objectifs d’appareils photos, des verres de loupes, des verres plan et toutes sortes de lentilles de quelques millimètres à plus d’un mètre de diamètre.

(Rendez-vous pour la troisième et dernière partie dans 
le "Coin de l'historien" du Porte-Plume de Janvier)

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