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Par Daniel DUBOURG

Dubourg daniel 6

Le voleur de hache

Un paysan ne retrouvait plus sa hache qu’il avait cherchée sans relâche. Il en conclut qu‘on la lui avait sans doute volée, quoi de plus logique ! Et l’auteur de ce vol ne pouvait être que son voisin qu‘il entreprit de surveiller étroitement, tentant de ne rien perdre de ses mouvements, allées et venues, observant au plus près jusqu’à ses mimiques et scrutant à distance son regard, en prenant la précaution de se dissimuler soigneusement. Sa conviction était bien arrêtée : c’était lui le voleur et personne d’autre, car tout le trahissait. Notre homme espérait également surprendre son voisin, sa propre hache en main. Cependant, sa surveillance se prolongeant sans succès, il retourna fort déçu à ses occupations.

Ce n’est que bien plus tard que le paysan, remuant un tas de bois derrière sa maison, retrouva son outil ! Dès lors, il fut bien surpris de ne plus rien dénoter de suspect dans les allures de son voisin, qu‘il rencontra le jour même.

Cette courte parabole chinoise nous en dit long sur le changement parfois rapide de notre opinion lorsque le soupçon s’installe. Il suffit d’un rien et parfois d’une opinion non fondée, pour que celui qui jusque-là, était exempt de tout soupçon, fasse aussitôt l’objet de suspicion.
Notre opinion sur autrui est-elle si fragile qu’elle puisse être ébranlée au point de changer aussi vite? Notre lecture de l’autre peut s’avérer aléatoire parfois. Et si nous n’y prenons garde, nous risquons fortement de déjuger et de changer notre façon de le percevoir, au point de nourrir à son endroit des sentiments différents qui s‘installent plus ou moins durablement dans un doute relationnel parfois lourd de conséquences.

Bien entendu, à force d’être trompé ou dupé, on acquiert une certaine circonspection, voire une prudence de bon aloi. Mais c‘est tout autre chose que de soupçonner quelqu’un d’un acte dont on n’a absolument aucune certitude qu’il l'ait commis.
Le moment est alors venu de s’interroger, de se remettre en cause, d'essayer de comprendre pourquoi on va si vite en besogne, et ce que cela peut révéler de nous, si nous avons une tendance marquée à procéder ainsi.
Notre voleur de hache n’en était pas un. Le paysan l’a bien compris, une fois mis devant le fait accompli.

Au moment de découper la bûche, (mais si, mais si !), cela ne coûtera rien d’avoir une pensée amusée pour les nains de plastique qui s’affairent et ne pensent pas…

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Commentaires

  • Denys de Jovilliers

    1 Denys de Jovilliers Le vendredi, 03 décembre 2021

    Un texte à méditer, qui m'a fait penser aussi à un phénomène de notre époque, l'utilisation malveillante des réseaux sociaux lorsqu'ils'agit de semer le doute sur des personnes.

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