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La contribution d'un lecteur du Porte-Plume
Ce mois-ci Gérard COPPENS

Gérard est un auteur non meusien qui a été invité sur le site de PLUME en octobre 2025. Cliquez sur ce lien pour (re)découvrir sa page "Invité".


Ecriture

Gérard Coppens nous propose un extrait de
"Terres lorraines" d'Emile MOSELLY

 

Il pouvait être sept heures du matin, en novembre.

Une aube pluvieuse filtrait du ciel bas, noyait les champs d’une désolation infinie. Les chaumes grisâtres, lavés par l’automne, revêtaient la terre d’une toison hérissée, pareille à un vêtement de miséreux. La pluie cessait par moments ; alors une buée d’eau se levait des bois, dont le moutonnement ondulait dans les lointains ; puis une déchirure livide s’ouvrait au flanc des nuages ; la pluie tombait en un ruissellement de cataracte, comme si toutes les eaux du ciel s’étaient ruées par cette ouverture.

La route dévalait presque à pic. Par endroits, des bancs de pierre affleurant le sol y faisaient des marches d’escalier pour des pas de géant, et ces pierres blanches étaient polies par la roue des charriots, par l’écoulement des eaux, par le glissement des sables.

Deux silhouettes s’ébauchèrent dans la grisaille du lointain, deux paysans qui marchaient côte à côte.

Ils s’arrêtèrent du même mouvement en haut de la montée, et s’étant adossés à des « landres » de bois sec, qui fermaient une friche, ils y appuyèrent les lourdes hottes d’osier qui leur sciaient les épaules.

Ils étaient tous deux étrangement pareils, vêtus de futaine grise que la pluie recouvrait d’une fine buée de gouttelettes, ayant le torse serré dans un tricot de laine brune. Leurs physionomies frustres et graves s’éclairaient du même regard bleu. Mais l’un était un jeune gars bien planté, dont les joues se recouvraient d’une barbe châtain, frisée et drue, tandis que l’autre, un vieux, tout courbé par le travail des champs, paraissait infirme, incapable de se redresser désormais pour regarder les nuages, le ciel lumineux, les spectacles qui égaient les hommes et les réconfortent.

Ils soufflèrent un moment, tandis qu’un pâle rayon de soleil, filtrant à travers la pluie, courait sur l’horizon, allumait des lueurs dans les buissons d’épine. Un roitelet, tout près d’eux, fit entendre quelques notes d’une chanson mouillée et frissonnante.

Puis l’averse redoubla…

***

Un bien joli texte, pas très gai, il faut l’avouer, qui me rappelle mon enfance lorraine.
(Gérard Coppens)

 

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