Les annexions sournoises

En cette période trouble où, souvent, s’affrontent des conceptions, des idées diamétralement opposées touchant à l’essence de la vie et du vivant, où sont tournées en dérision des idées humanistes, où le mépris et la forfanterie se nourrissent d’ignorance et de désirs exacerbés, le tout assorti de mensonge, dans l’unique perspective de dominer, se rendre maître de tous et de tout sans vergogne et sans respect, il peut être utile de s’interroger sur les annexions sournoises dont chacun d’entre nous peut être victime, souvent à son insu.

L’annexion des esprits a toujours existé ; ce n’est donc pas nouveau. Mais à présent, elle s’opère de façon sournoise, perverse.

Dans le domaine géopolitique, le droit international dit : « l'annexion est l'acquisition par la force et l'affirmation d'un droit de propriété légal sur le territoire d'un État par un autre, généralement à la suite d'une occupation militaire de ce territoire. Elle est généralement considérée comme un acte illégal » (généralement ?)

La colonisation, de nature plutôt physique, repose le plus souvent sur un système d'exploitation des ressources ou des populations. Le système est visible, détectable.

Détectable. La nuance est de taille. Si nous ramenons ces propos aux personnes, le fait d’être « colonisé » implique que nous subissons l’exploitation de quelqu’un ou d’un groupe qui a le statut d’envahisseur. Cela est du domaine du palpable, du matériellement visible et les conséquences physiques sont alors ressenties. Les peuples colonisés offrent de nombreux témoignages de cette situation, où les colonisateurs sont venus pour exploiter, tirer bénéfice des ressources existantes.

L’annexion procède d’intentions différentes encore moins louables, car elle se fonde sur le désir de prendre le pouvoir sur l’esprit des gens à leur insu.

Les méthodes employées sont peu décelables et se caractérisent par une instillation lente, donc imperceptible, et il en résulte que la personne annexée est donc manipulée.

Ne pas s’apercevoir. Mais juste savoir que comportements, idées, manières de penser changent lentement en même temps que cela semble tout à fait normal. Nous sommes dans la manipulation. Et ceci, grâce à des méthodes utilisées par le manipulateur qui, bien sûr, ne montrera pas la moindre relation d’aide.

L’annexion est une action perfide, car son moteur silencieux avance masqué. On ne se rend donc pas compte que l’on se trouve peu à peu manipulé.

Celui ou celle qui pratique l’annexion use de stratagèmes subtils distillés au goutte à goutte, à doses homéopathiques. Il utilise la psychologie et le comportement. Insidieuse, elle l’est parce qu’elle ne se dévoile pas et utilise la plupart du temps des ressorts et des arguments qui semblent plutôt aller dans la sens de la compassion, de la flatterie et des suggestions sentant le piège. Le sol se dérobe sous vos pieds et vous ignorez la chute.

En psychologie, la manipulation se définit comme une action visant à influencer ou contrôler une autre personne, généralement de manière sournoise ou subtile, afin de servir ses propres intérêts. Les méthodes employées sont :  la séduction, la suggestion, la coercition et le chantage.

La manipulation émotionnelle se définit essentiellement comme la tentative d'une personne de contrôler ou d'en influencer une autre par des moyens indirects, souvent dissimulés, plutôt que par la communication ou la négociation directe. Les manipulateurs utilisent des tactiques telles que la culpabilisation, le gaslighting (décervelage) et l'exploitation des faiblesses émotionnelles pour parvenir à leurs fins.

Des études montrent que les personnes présentant des traits de personnalité narcissiques sont plus susceptibles de manipuler autrui. Le trouble de la personnalité narcissique se caractérise par une opinion excessivement positive de soi-même. Vous avez besoin d'attention et d'admiration, mais vous êtes indifférent aux sentiments des autres.

Difficile d’affirmer que l’on se sent manipulé. Le recours a une aide est donc souvent inévitable, quelqu’un qui pourrait vous ouvrir les yeux.

De nos jours, il n’est peut-être pas superflu de parler d’annexion sournoise, de cette prise de pouvoir qui ne dit pas son nom pour mieux parvenir à ses fins : la domination totale d’autrui où l’on perd ses repères, sa propre façon de penser, son esprit critique, alors qu’il est, dans ces moments-là, indispensable de prendre du recul pour faire le point sur soi-même, afin de savoir où l’on en est de son autonomie de penser.

De nos jours, la manipulation se pratique à grande échelle. Et l’annexion est devenue telle, que certains trouvent normal et légitime que l’on instaure, sur la planète, des façons d’être et agir qui finissent par ne plus choquer.

C’est alors la banalisation sur laquelle risquent se fonder des communautés de pensée. Une société de maîtres seuls désireux de combler leur idéal de toute puissance, qui dicteront alors leurs conceptions et les prescriptions utiles à des individus ayant perdu toute pensée critique, et prêts à tout accepter, pourvu qu’on les abreuve de matérialisme, de jeux du cirque et de propos lénifiants qui les rassurera sur leur beauté et leur perfection, sans leur parler d’asservissement, bien entendu.

Ah ! on vient me dire que cela n’est pas près d’arriver ! J’ai sans doute fait erreur.